Beaucoup de recensions du livre de Joël Cornette en deux tomes de "Histoire de la Bretagne et des Bretons" sont élogieuses et nous avons le sentiment que cela provient du fait que l’auteur, adroitement, et sans doute sincèrement, a inscrit son propos dans un discours "réconciliateur".
Il paraît intéressant d'analyser pourquoi un ouvrage qui fait justice à bien des revendications bretonnes, comme celle de la réunification ou de la langue, et qui rend hommage à une Bretagne qui n'aurait désormais plus de complexe à avoir, est si apprécié chez les historiens de l'école française.
A lire le compte rendu de Thierry Sarmant (*) et de bien d'autres, on a le sentiment que Joël Cornette dédouane la partie française en laissant entendre que malgré la pression de leurs voisins français, les Bretons n'ont pas subi autant de dommages que ce qu'une certaine opinion nationaliste bretonne aurait prétendu. Tous les articles parus dans la grande presse parisienne abondent dans le même sens, qui indiquerait que la presse nationaliste, ou même simplement identitaire, aurait exagéré les exactions du pouvoir centralisateur français à l'encontre des libertés et de l'identité bretonnes.
Le message de Joël Cornette serait donc de nature à apaiser la partie bretonne dans la mesure où elle peut se prévaloir d'un rôle important dans l'Histoire. Son ouvrage arrive à point nommé au moment où les Français se mettent à douter de leur passé et de leur propre identité. Celle-ci n'est-elle pas mise à mal par les émeutes des banlieues, le rappel du rétablissement de l'esclavage par Napoléon, l'inopportunité du vote parlementaire d'une loi sur les aspects positifs de la colonisation, etc...?
Il nous semble en fait que si Joël Cornette redonne à la Bretagne et aux Bretons une plus éminente place, la sympathie qu'il inspire aux historiens de la France et des Français vient surtout de la dispense de réparation qu'il leur accorde.
C'est un peu comme si un historien africain donnait une version de l'Histoire qui réhabiliterait la colonisation en montrant combien d'Africains ont pu être sauvés de la mort grâce à l'action courageuse du service de santé colonial.
Cette façon de mettre à égalité deux communautés humaines dans un débat existentiel vise sans doute à les réconcilier dans une même vision historique, mais elle souffre hélas du défaut d'occulter les conséquences toujours actuelles du rôle et de la responsabilité de l'oppresseur des temps révolus.
Dans le contexte spécifique franco-breton, on peut relever un semblable défaut de conciliation inéquitable qui oblitère toujours l'histoire des relations entre la Bretagne et les Bretons avec le pouvoir français au long des régimes qu'a connus la France de 1532 à nos jours.
Car nous ne sommes pas encore quittes ! Hélas non, malgré tout ce qu'on pourra publier sur la grandeur des Bretons, tant que nos contentieux ne seront pas réglés avec le pouvoir que s'est octroyé la France sur le territoire historique des Bretons. Nous nous limiterons aux trois contentieux fondamentaux :
C'est par un juste règlement de ces contentieux que s'écrira le chapitre le plus apaisé de l'Histoire à venir de la Bretagne et des Bretons.
L'analyse que nous effectuons des critiques étonnamment favorables de "l'école française" n'aliène en rien la liberté de Bretons du Monde – OBE de recommander ce livre à tous les Bretons privés de leur histoire par l'enseignement d'une autre histoire officielle, à la tendance encore obstinément jacobine. En conséquence, Bretons du Monde – OBE donne un satisfecit, à l'auteur pour avoir bien souligné plusieurs points fondamentaux de l’histoire des Bretons :
1) La Loire Atlantique est reconnue bretonne sans réserve dans le livre.
2) L'acte dit d’union de 1532 est bien reconnu comme TRAITE INTERNATIONAL, indiquant ainsi que la Bretagne et la France ont traité d'EGAL à EGAL et que les termes de l'acte ont force de loi devant une juridiction internationale.
3) L'œuvre de l’historien breton Bertrand d'Argentré est reconnue comme élément majeur de l'histoire des Bretons.
4) Le titre du livre de Joël Cornette indique "Histoire de la Bretagne et des BRETONS". Il ne s'agit donc pas de l'histoire d'un pays antique à la spécificité humaine disparue, noyée ou remaniée à un point tel qu’il ne constitue plus qu’un substrat des peuples actuels, comme c’est le cas de l'Egypte ancienne, du Mexique précolombien ou de la Gaule. Parmi les peuples, qui en revanche, nous paraissent avoir mieux préservé leur continuité historique, nous plaçons les BRETONS, ce peuple toujours vivant qui est le nôtre.
Pour le bureau de Bretons du Monde - organisation des Bretons expatriés
Reun Alan
(*) Docteur de l'université de Paris-I-Sorbonne, Thierry Sarmant est conservateur en chef du patrimoine au Service historique de l'armée de Terre. Il a publié une vingtaine d'articles sur l'histoire politique et culturelle de la France moderne et contemporaine et six ouvrages dont Les Demeures du Soleil : Louis XIV, Louvois et la surintendance des Bâtiments du roi (2003) et La Roumanie dans la Grande Guerre et l'effondrement de l'armée russe (1999)
Sources: (voir le site)