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Ouest-Atlantique et promotion de l’ « Ouest »
Le 1er janvier 2006, la région Bretagne qui souhaite désormais assurer sa promotion industrielle toute seule quittera l’Association Ouest-Atlantique ( OF 8/9 - 01). Pour le commun des mortels cela peut ne pas paraître une information importante. Pourtant elle l’est, et les conséquences de cette décision peuvent être profondes. Rappelons
Par pour Institut Culturel de Bretagne le 13/01/05 20:57

Le 1er janvier 2006, la région Bretagne qui souhaite désormais assurer sa promotion industrielle toute seule quittera l’Association Ouest-Atlantique ( OF 8/9 - 01). Pour le commun des mortels cela peut ne pas paraître une information importante. Pourtant elle l’est, et les conséquences de cette décision peuvent être profondes. Rappelons que « Ouest Atlantique » fut, depuis 1970, avec le Commissariat à l’Industrialisation de l ‘Ouest » un outil inter-régional bénéficiant du soutien de la DATAR. Cofinancée par l’Etat, le secteur public régional et le secteur privé, une structure d’incitation aux implantations industrielles. Elle fut mise en place sur un territoire « Ouest » , soit Bretagne, Pays de la Loire et Poitou-Charentes. L’argument de cette aire d’intervention était qu’il serait moins difficile, au plan international, d’assurer la recherche et la négociation de nouvelles implantations, l’économie d’échelle permettant l’entretien d’une équipe suffisante et compétente à Nantes. Par ailleurs il était représenté que, vue de Los Angeles ou d’Osaka, une dimension plus petite, la Bretagne par exemple, serait, pour les investisseurs, plus difficilement identifiée ou lisible.

La décision de la Région Bretagne semble invalider ces deux arguments.

Il convient, dans un premier temps de prendre acte de cette décision bretonne. Une décision qui ne peut pas ne pas s’inscrire dans une perspective où la Bretagne recouvrerait l’ensemble de son territoire, notamment la Loire-Atlantique, la « quille du bateau » . En effet la puissance économique et financière d’une région réunifiée se trouvera de ce fait très amplifiée : avec un PIB actuel de l’ordre de 85 milliards d’Euros, la Bretagne ne sera dépassée – hors Ile-de-France - que par deux autres régions françaises : Rhône-Alpes et Provence Alpes-Côte d’Azur. Encore sa notoriété internationale est-elle déja supérieure à ces deux ensembles. Vu comme cela, on comprend mieux la décision de la Région de Bretagne. Loin d’un repli identitaire, c’est la volonté d’instrumentalisation d’une cohérence économique comme celle d’une image porteuse qui ont pu être invoquées.

La décision est d’ordre politique et pourtant, nous sommes en plein marketing.

« Vendre » la Bretagne aux investisseurs potentiels, cela revient d’abord à répondre aux questions que ceux-ci se posent à propos de la confiance qu’ils peuvent accorder à l’avenir d’un territoire et de ses habitants. En effet, quand un industriel s’implante sur un site et y lance une production, il se pose dans l’ordre surtout cinq questions :

- Quel seront mes coûts d’énergie, de matières premières, salariaux et sociaux ? - Comment, à quel prix, et avec quel niveau de confiance pourrai-je, à partir de ce point, toucher les marchés qui absorberont mes productions ? - De quelle culture technique les gens de ce pays disposent-ils ? - Quelle confiance pourrai-je avoir dans les cadres, les collaborateurs que j’en gagerai ? Seront-ils, en outre, capable d’intégrer ma propre culture d’industrie ? - De quelles aides puis-je bénéficier ?

En dehors d’éléments objectifs comme les liens maritimes ou terrestres ou encore les coûts de main-d’œuvre, on remarque que le « trépied » confiance/honnêteté/dynamisme tend a être un facteur maître dans la négociation – C’est vrai dans le système de production, mais aussi dans la logistique (flux tendus) ou encore dans les contacts avec les autorités locales. Or il s’agit justement d’un facteur dont la maîtrise dépend d’une culture. Si je veux pouvoir faire confiance à des Indiens, je ferai appel à leur sens du karma et je rentrerai dans le jeu de cette culture – grâce au karma, ils seront complices de mon aventure industrielle. On peut de la même façon avancer qu’il y a bien une manière bretonne d’accorder sa confiance ou sa parole ; c’est une donnée culturelle dont la valeur est incommensurable. Dans la plupart des autres régions de France, une telle affirmation prêterait à sourire. En extrapolant on peut parler de valeurs d’entreprise plus spécifiquement bretonnes. Des enquêtes récentes tendent à démontrer que ces valeurs peuvent, comme d’autres, contribuer au marketing régional.

De plus en plus, des Japonais, des Coréens, des Scandinaves, des Américains aussi s’intéressent à la prise en compte des éléments culturels ou humains ainsi que des images qui leur sont attachées. Ainsi, ils ne sont pas indifférents à la réputation d’hommes et de femmes souvent courageux, fidèles et honnêtes, solidaires et attachés à leurs racines ou à leur patrimoine qui caractérise les Bretons. Même notre entêtement proverbial est vu comme une connotation positive.

Bref, il existe bien une liaison entre le message d’entreprise et l’existence d’une empreinte culturelle localisée.*

Serait-on coupables de « repli identitaire » pour utiliser sans excès à des fins économiques les valeurs propres à une région ? Le marché des implantations est hautement concurrentiel et mondialisé. On doit pouvoir faire feu de tout bois.

La Région Bretagne, si elle veut vraiment s’attaquer au marketing géographique et utiliser ses images, dont beaucoup sont positives serait bête si elle ne s’en servait pas…

Elle pourrait même faire école – Pourquoi, par exemple, une région « Val de Loire » ne profiterait-elle pas d’une action comparable ?

Faut-il pour autant nier toute vertu à l’action inter-régionale au niveau d’un ensemble plus vaste comme le grand Ouest ? Certainement pas, mais il serait inutile d’en faire quelque chose qui irait au-delà d’une coalition d’intérêts pour des objectifs qui vont bien au-delà d’une seule Région. Exemples : le TGV et l’innervation « fer » dans l’Ouest, l’aéroport international d’Armorique à ND des Landes, des aménagements fluviaux, des réseaux de toutes sortes. Sur ces sujets il y a vraiment de la place à une coopération vaste, parfois a échelle variable, qui pourrait passer par exemple, par le montage de sociétés d’économie mixtes dédiées. L’expertise nécessaire à de nombreux projets de ce genre pourrait voir intérêt à se concentrer sur un site central, NantesManifestement, dans sa forme, Ouest-Atlantique ne peut pas survivre sur un territoire aussi bizarre que celui qui lui reste une fois la Bretagne partie. Mais l’idée de se recentrer sur les infrastructures ne lui permettrait-elle pas de trouver un nouveau souffle ?

Yves Lainé ** 12.01.05

· Etude Sciences’com/Agence Morvan Lebesque 2000-2001 · Ancien membre de Ouest Atlantique et du CELIB – Auteur de « L’ambition de Bretagne d’un Nantais » Ed.Petit véhicule Nantes

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