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- Discours -
Session plénière CESR : évolution des outils de la Charte : vers une nouvelle étape
La proposition du président Le Drian concernant l'évolution des outils de la Charte a été étudiée en session plénière du CESR ce lundi 13 octobre après-midi. Réactions et bilan.
Alan Monnier Par SUAV-ICB le 13/10/08 12:21

1) La proposition du président Le Drian concernant l'évolution des outils de la Charte a été étudiée en session plénière du CESR ce lundi 13 octobre après-midi. Le rapport le concernant a été trouvé trop limitatif à l'égard de l'initiative régionale par certains (cf. ci-dessous), pas assez pour d'autres.

Parallèlement à cette intervention, plusieurs organisations syndicales sont intervenues sur le sujet, de même qu'un représentant des chefs d'entreprise et de l'Université. Les votes se sont ensuite répartis de façon fort diverse : le rapport n'a été adopté que par 38 voix pour, a comptabilisé 4 voix contre et 56 abstentions dont le représentant CCB/ICB.

2) Intervention d'Alain Monnier, représentant de Kuzul Sevenadurel Breizh / Conseil Culturel de Bretagne et Skol Uhel ar Vro / Institut Culturel de Bretagne

Le président du Conseil régional, 30 ans après l'adoption de la Charte culturelle de 1977, proposée par le président de la République Giscard d'Estaing, souhaite faire un bilan et certainement permettre au mouvement culturel breton de bénéficier de nouvelles opportunités, plus adaptées au monde d'aujourd'hui.

Le bilan montre que les « outils » créés depuis trente ans ont dû évoluer pour s'adapter à des transformations récurrentes ; il montre aussi que la tâche entreprise par les associations pendant ces décennies dans les domaines aussi variés et aussi vastes que la langue bretonne et le gallo, la musique et la danse, les littératures orale et écrite, l'Histoire et la société, le cinéma, les radios et autres médias, les savoirs et techniques, l'artisanat et les arts populaires, les productions plastiques et les jeux traditionnels, etc. a eu des effets incontestables dans la vitalité et l'attractivité de la Bretagne.

Dans le domaine culturel comme dans d'autres, si le monde associatif n'avait pas été là, avec les fonds des collectivités, bien entendu, mais aussi ceux de nombreux particuliers, beaucoup de notre patrimoine ne serait pas si vivant aujourd'hui, c'est-à-dire qu'une partie aurait pu disparaitre dans l'oubli ou se figer définitivement, ce qui revient peut-être au même.

Aussi le bilan de ces décennies est-il considérable et il n'est pas étonnant qu'il y a 8 ans, le CESR, dans le rapport de MM. Latour et Le Faou, ait parlé de « Dynamique culturelle bretonne » après un élan qui venait de loin, pour un pays qui revenait de loin…

Déjà, en effet, peu de temps après la création du CELIB, le Général De Gaulle avait déclaré (9 septembre 1968) : « Il est nécessaire de donner à chaque région une vie propre pour que notre pays mette en valeur tout ce qu'il vaut dans chacune de ses parties et cesse en se vidant lui-même d'amasser sa substance à Paris et ses alentours. »

Parce qu'en retard alors en matière de développement et ignorée dans ses spécificités géographiques et culturelles, la Bretagne avait voulu se remettre à jour et - pourquoi pas - se donner de l'avance. Les milieux socio-économiques, le monde associatif, plusieurs responsables politiques y ont contribué chacun à leur façon.

Le projet du président Le Drian l'indique : « Le succès de la Charte, mais qui est surtout le succès de la décentralisation réalisée trois ans plus tard, c'est d'avoir, comme elle le proposait “constitué un pas vers la prise en charge, par la Région, de sa politique culturelle”. »

Aujourd'hui, dans une même logique, pour le domaine où les organisations que je représente sont pleinement concernées, lorsque le Président du Conseil régional entend faire bénéficier la Région Bretagne du « droit à l'expérimentation inscrit dans la Constitution afin de développer et mettre en œuvre une politique linguistique en adéquation avec les attentes des Bretons » (p. II-17 des Orientations pour le budget 2009), il veut sans doute conserver à la collectivité dont il est responsable cette capacité à anticiper, au moins à ne plus connaître de retard.

Et c'est là qu'intervient l'autre aspect de la proposition du président Le Drian, non seulement sa cohérence avec une certaine logique de ces trente ou quarante dernières années mais aussi sa concordance avec le cadre juridique européen et même international. C'est pourquoi, le document se réfère à la Convention de l'Unesco sur la diversité culturelle (2006).

Dans le domaine juridique, je ne vous infligerai pas la liste des manquements de la France, manquements qui coexistent avec les projets décentralisateurs. Je ne ferai que me référer à un article publié vendredi dernier par L'Express, qui titrait « Paris invité à signer la Convention européenne sur les minorités », c'est-à-dire à régler ce qui, aux dires de Thomas Hammarberg, commissaire aux Droits de l'homme du Conseil de l'Europe, est « un problème », et pour ces ONG « une situation extrêmement préoccupante ». En effet, dix ans après l'entrée en vigueur de cette convention, 84 ONG ont demandé à la France, et aux autres pays qui ne l'ont pas ratifiée ou signée, de le faire « sans délai et sans condition ».

Aussi, compte tenu des moyens investis par la Région, comme de l'évolution du contexte à la fois national, régional mais aussi européen et international, compte tenu du besoin impérieux de rendre accessible au plus grand nombre de Bretons, quelle que soit leur origine, cet outil fédérateur qu'est le Conseil culturel de Bretagne, les associations que j'ai l'honneur de représenter ici se félicitent de la proposition du président Le Drian, dans laquelle elles veulent voir en effet une « nouvelle étape », aujourd'hui aussi indispensable à la langue et à la culture qu'à la démocratie, et cela tant en Bretagne que dans le reste de la République française.

Le président du Conseil régional envisage dans un premier temps d'assurer un rôle conforté au Conseil culturel pour permettre et accompagner cette évolution : les acteurs et les experts pourront exprimer les besoins du terrain, ils seront écoutés et associés à la décision.

Au regard de l'importance de ce texte et de ses enjeux depuis le domaine des droits de l'homme jusque dans celui du développement local, on était en droit d'attendre du CESR moins de défiance que celle dont le rapport fait preuve et qui fait que je ne voterai pas ce rapport : défiance vis-à-vis de la proposition, défiance vis-à-vis de la culture, défiance vis-à-vis des propres travaux de notre assemblée, puisque des quelque 180 pages du rapport Latour-Le Faou, nous ne retiendrions (p. 2 du présent rapport CESR) que deux lignes très réductrices sur la culture de la Bretagne. Cela dit sans trop insister quant à ce qui a pu passer pour de la défiance à l'égard des habituels rapporteurs sur les dossiers culturels et alors que, dans le même document, l'on prêterait à l'État (p. 3 du présent rapport CESR) un rôle qui serait en contradiction avec les dispositions que M. le Préfet de Région a fait connaître par une note de service en juillet dernier. Les personnes qualifiées seraient ainsi dessaisies tandis qu'auraient à s'exprimer des personnalités qui ne souhaitent pas ou plus le faire.

Pour en revenir au rapport CESR (p. 2), l'identité ne peut jamais se réduire à la reproduction de clichés. L'identité bretonne n'a pas une façon unique de s'exprimer, elle ne se veut pas exclusive de toute autre appartenance ; elle n'est ni facultative, ni obligatoire, mais dans le contexte culturel, démographique, social, économique d'aujourd'hui, elle est indispensable ; les pages II-16 et 17 des Orientations budgétaires 2009 expliquent clairement et sans complexe pourquoi. Et c'est ce que ces trente années ont également prouvé : l'identité bretonne ne peut plus être passée sous silence voire interdite.

La question que posait, en 1970, Morvan Lebesque, « Comment peut-on être breton ? » - volume utilement sous-titré « essai sur la démocratie française » reste une question ouverte, c'est-à-dire un projet. Nul n'ignore que l'auteur a puisé chez Montesquieu cette interrogation pour qui, selon les manuels de nos lycées, elle traduit l'intolérance et le chauvinisme : « … si quelqu'un, par hasard, apprenait […] que j'étais Persan, j'entendais aussitôt autour de moi un bourdonnement : Ah ! ah ! Monsieur est Persan ? C'est une chose bien extraordinaire ! Comment peut-on être Persan ? » À côté de « l'Héritage des Celtes », il y a effectivement des jours où certain héritage des Lumières mériterait d'être mieux partagé…

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