Tectonique des plaques

Puisque nous en sommes aux confidences, laissez-moi vous avouer une chose : je suis soulagé... Ouf ! Eh bien écoutez : on l'a échappé belle ! Car finalement c'est le "Gwenn ha du" qui figurera sur les nouvelles plaques minéralogiques. Non qu'il soit d'une fascinante beauté - je le trouve un peu rigide - mais il a le mérite d'être connu et accepté de tous. En tout cas, de par une sage décision du Conseil Régional, on échappe au logo de la RAB (Région Administrative Bretagne) et c'est bien là l'essentiel.

Celui-ci m'a toujours navré. Depuis le début. Je n'en veux à personne, je n'en fais pas une maladie, mais c'est ainsi. Il faut le dire : je le trouve pusillanime, fadasse, sans caractère... On a le droit de donner son avis en toute franchise ! C'est même un honneur...

Vous me direz : remettez vous, quand même pas grand chose, simple détail... Question d'appréciation après tout : les goûts et les couleurs... Et puis, haussant le ton : c'est tout ce que vous trouvez à dire, avec tout ce qui se passe dans le monde ? Hein ? Mondialisation, tsunamis, guerres atroces, terrorisme, tremblements de terre : que l'embarras du choix. Arrêtez donc de tout voir par le petit bout de la lorgnette, bon sang de bois...

Je m'excuse de vous demander pardon, mais, tout en reconnaissant les griefs, je suis au regret d'insister... Parce que tout de même : une hermine sans personnalité qui vole au gré des vents telle une feuille automnale emportée par la brise, même si l'image recouvre une certaine part de réalité vue la faiblesse structurelle des régions françaises, ce n'est pas du tout la vision de la Bretagne que j'aimerais voir diffuser.

Ma Bretagne, c'est justement un caractère marqué, une personnalité forte, une volonté affirmée. A commencer, tenez, par sa forme géographique, sur la carte, ou saisie par photo-satellite : rien de mollasson, de la structure, au contraire, un air décidé face à l'Océan. Regardez nos sérieuses constructions de granit, nos manoirs bien implantés, nos lieux de culte flamboyants. Observez les costumes de nos clans de pays anciens : de la couleur, de la coupe, du nerf. Admirez nos seigneurs de la mer : pas des mauviettes ! Ecoutez notre musique renaissante : inimitable. Et le reste ! L'immense reste dont témoigne une Histoire qui, il est vrai, ne nous est pas enseignée... Une "région à forte identité", avoue même dans ses bons jours, un appareil d'état pourtant plus enclin à raboter qu'à sculpter en relief... Ceci sans parler du niveau graphique ambiant acquis peu ou prou depuis les "écoles" prestigieuses, Pont Aven et les autres, dont on se rend compte en voyageant ailleurs et qui devrait, au minimum, nous préserver de ce type de mièvreries.

Je sais bien qu'il ne s'agit que du symbole de la RAB, pas de la Bretagne proprement dite, mais ce n'est pas une excuse ! Dites, en parlant de symbole et sans vouloir copier, le rouge dragon des Galles sur son champ vert ou le noir lion des Flandres sur son champ jaune : cela vous a tout de même plus fière allure... Mais baste !

Pour conclure sur les plaques, d'un ton frondeur dont je vous prie de m'excuser, mais c'est plus fort que moi : que voilà une belle occasion pour nos compatriotes de Loire-Atlantique d'affirmer leur appartenance bretonne aux yeux de tous. Qu'ils courent se faire immatriculer "Bretagne" en rajoutant leur 44 ! Cela nous rappellera la "bataille" du BZH... Que tous les réseaux bretons les soutiennent ! Que publicité soit faite autour du criant déni démocratique ! Qu'à cette nouvelle occasion, l'illégitime annexion sans cesse pérennisée et l'insupportable substitution d'identité en cours soient rappelées de plus belle à nos voisins européens, à Bruxelles, aux instances onusiennes !

Il faut savoir ce que l'on veut. Car ce ne sont sûrement pas les Pays de Loire qui vont lâcher le pactole ! Dites : on vous fait cadeau - peu importe qui et comment - d'un débouché maritime dont, au cours des siècles, vous n'aviez jamais osé rêvé... On vous adjoint deux ports exceptionnels... Une région prospère... Une population industrieuse égale à celle de deux départements ordinaires... Et, cerise sur le gâteau, on vous offre le château seigneurial du voisin...

Vous refuseriez, vous ? Honnêtement...?