À l’occasion de la tenue du procès Colonna, la Ligue Bretonne des Droits de l’Homme tient à réagir sur quelques éléments révélateurs des manières de la justice spéciale «anti-terroriste» en France. Tous ceux qui, ces dernières années, ont eu à subir la répression juridico-policière ne s’étonneront pas de la manière dont plusieurs témoins ont relaté leurs gardes à vue : il est de notoriété publique que celles-ci sont l’occasion de pressions sur les personnes interrogées. Ainsi de Michèle Alessandrini qui rapporte "les souffrances et les humiliations subies lors de la garde à vue". "J'avais peur de prendre des coups, j'entendais pleurer dans le couloir... des bruits de bottins" ou encore : "la juge m'a dit que mes enfants iraient à la DDASS". Ou encore Nicole Huber-Balland qui décrit des interrogatoires où elle est "malmenée et manipulée", où on lui "crie dessus". Pour finalement asséner : "Je suis très étonnée par mes déclarations... On me soufflait les choses". Mais de telles manipulations n’ont-elles pas déjà eu lieu concernant des affaires s’étant déroulées il y a quelques années en Bretagne? Rappelons aussi, comme cela a eu lieu ici il y a quelques années, l’empressement de quelques responsables politiques, et singulièrement Nicolas Sarkozy - à l’époque ministre de l’Intérieur - à désigner un coupable, cela au mépris de tout respect de la présomption d’innocence. Rien de vraiment étonnant finalement, quand on voit que lors de son audition du 26 novembre, Roger Marion répond “non” à la question “Oui ou non, êtes-vous présent lorsque Maranelli donne le nom de Colonna ?”, alors que dans son livre paru cette semaine au Seuil il écrit : “J’entends alors moi-même Didier Maranelli raconter qu’il fait partie d’un groupe de sept activistes qui ont décidé de provoquer un électrochoc en tuant le plus haut représentant de l’État en Corse (...).” Et au fait, pourquoi Roger Marion, témoin cité par la défense, a-t-il été convoqué à l’Élysée par Claude Guéant, bras droit du président de la République, fin octobre ? Un debriefing de dernière minute, peut-être ? Quid aussi des propos du médecin légiste ayant affirmé que Colonna ne pouvait être le tireur, compte tenu de sa taille. Une fois de plus, comme il semble être la règle dans ce genre d’affaires, comme dans le cadre de l’instruction, le procès se fait principalement à charge. Comme si pour l’accusation et la partie civile l’accusé était bien le coupable idéal. Ajoutons enfin que la mission d'observation de la Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH), chargée de suivre l'intégralité du procès, n'est pas en mesure d'accéder librement à la salle d'audience, comme le souligne une dépêche AFP du 30 novembre. Cette mission est notamment composée de deux avocats qui rédigeront un rapport destiné à la FIDH à l'issue du procès. La justice spéciale anti-terroriste française aurait-elle quelque chose à cacher ? Pour la LBDH M. Herjean