Suite du journal de campagne de J.C. Perazzi
Jeanne d'Arc et l'élection présidentielle. Un grand vent a soudain secoué il y a peu le microcosme politique et médiatique hexagonal, réveillant du même coup la conscience, l'intérêt (?), l'incompréhension des électeurs et électrices potentiels du mois d'avril. Des électeurs (et « trices » ) bêtement préoccupés par leur pouvoir d'achat, le chômage, les fins de mois difficiles et tout le reste ; terriblement angoissés par le fait que la perte d'un « A » va les plonger demain dans un abîme de détresse ; se demandant comment le nouveau roi de France, après le second tour de l'élection, va les aider à sortir de leurs difficultés de la vie quotidienne. O Ma Doue !
Jacques-Yves Le Touze (cf. sa chronique ( voir notre article ) du 6 janvier 2012) a très opportunément rappelé qu'il y avait « Jeanne » et « Jeanne » . Chez nous elles avaient nom « La Flammme » et « de Penthièvre. »
S'en est suivi sur le blog un flot de remarques, de commentaires, de critiques. Un vrai débat d'experts de notre histoire ancienne ; quelques-uns y allant aussi d'avis qui n'avait rien à voir avec le sujet. Passons.
Ayant une certaine préférence pour l'histoire contemporaine ou proche de notre pays à construire (ou à reconstruire), je me garderai bien d'en rajouter. Le journaliste n'a ni le recul, ni toujours la possibilité de vérifier sur des documents et témoignages anciens ses informations. L'écriture de l'histoire, son analyse, sa compréhension, ne sont pas, du coup, pas les mêmes. Le sujet concernant les Jeanne, me fournit quand même l'occasion d'évoquer deux ou trois faits d'un passé plus ou moins récent.
Les fêtes « patriotiques » dans notre village donnaient l'occasion au maire et autres notables de lire sur le monument aux morts local les noms des victimes des guerres de 14 et de 40. Et le garde-champêtre y allait, derrière chaque nom d'un vibrant « mort pour la France ! »
Cette répétition mécanique provoquait chez les gosses des écoles locales, rassemblés pour la circonstance -ils le sont toujours plus ou moins-, un fou rire difficilement contenu. Ce qui nous valait une sévère remontée de bretelles des adultes. Qu'en aurait pensé, qu'en pense un grand-père maternel revenu de Verdun les poumons brûlés par le gaz moutarde, un oncle (son fils), bien endommagé au terme d'une campagne d'Afrique, d'Italie, d'Alsace particulièrement rude, un frère qui préfère de pas évoquer un « conflit » d'Algérie qui a laissé des traces des deux côtés de la Méditerranée ?
En 1988, je rencontrai pour mon journal Jean-Yves Coulon, directeur du Pact-Arim d'Ille-et-Vilaine. Passionné d'histoire, il avait consacré, profitant de ses déplacements sur le terrain, une étude aux monuments aux morts de Bretagne. Environ sept cents visités ! Selon les historiens, 130 ou 250 000 Bretons sont morts ou disparus lors de la première guerre mondiale.
Le 12 novembre 1918, un député breton de Loire-Inférieure (la Loire-Atlantique d'aujourd'hui), déposait une loi proposant d'édifier des monuments commémorant le retour à la paix. Mais, moins d'un an plus tard, le 10 octobre 1919, la Chambre des députés votait la fameuse loi revue et corrigée : « pour la commémoration et la glorification de morts pour la France. » « Rien n'est neutre dans les monuments » , commentait alors Jean-Yves Coulon. En effet. On fit venir en Bretagne et ailleurs des trains entiers d'obus et de chaînes… pour l'édification sur notre sol des fameux monuments. Mais seulement une poignée de monuments pacifistes, représentant une colombe ou une veuve, ont été construits chez nous.
La conclusion de Jacques-Yves Le Touze, dans son texte du mois dernier, évoquant les statues de plâtre de Jeanne d'Arc que l'on voit dans nombre de nos églises : « Elle doit sa présence en Bretagne à la domination mémorielle, historique, culturelle et politique française. On est pour ou contre, mais c'est un fait. »
Rien à ajouter ; rien à retrancher.
Jean-Charles Perazzi
Cette chronique va s'interrompre durant trois semaines. Il s'agit, avec une petite équipe de « Voyages coopératifs » (siège à Lorient), d'étudier sur place la manière dont un petit pays grand comme la Bretagne (le Costa Rica), les Indiens, les Métis et les autres habitants de ce pays paisible et… sans armée, protège ses espaces naturels. Un tiers du territoire ! Comment aussi ils développent leurs petites structures d'hébergement en harmonie avec l'environnement.
De séjourner dans une petite coopérative qualifiée de « modèle » , de découvrir des réserves orientées vers la sensibilisation de ce patrimoine naturel si fragile.
A très bientôt.