La loi sur la rétention de sûreté, adoptée dans la nuit du 9 au 10 janvier par les députés français, est liberticide et dangereuse. La Ligue Bretonne des Droits de l'Homme tient à condamner fermement ce texte. Selon la ministre de la Justice Rachida Dati deux centres de rétention seront créés, dès cette année à Fresnes, en banlieue parisienne, et à Lyon, l'an prochain. La loi élargit l'application du texte "aux criminels les plus dangereux".
Cette loi introduit un changement radical dans le droit français et l'on ne peut que critiquer cette dérive. Tout le système judiciaire repose aujourd'hui sur un principe simple : il n'y a pas de prison sans infraction. Or, là c'est tout à fait autre chose, c'est après la peine effectuée que l'on maintient quelqu'un en prison, non pas au titre d'une infraction pour laquelle il a été condamné, mais au titre d'une infraction virtuelle, d'un crime qu'il pourrait éventuellement commettre s'il était libre.
Cette dérive est dangereuse d'autant plus que cette loi est étendue, suite aux derniers amendements déposés, non pas simplement à ceux que l'on appelle les délinquants sexuels mais à tous ceux qu'on appelle des criminels dangereux.
Sur quels critères et par qui il sera décidé qu'un individu est dangereux ? Par des psychiatres ? Par une commission ? Pourquoi pas par le pouvoir politique si cet individu est un militant politique basque, breton, corse ou autre ? Jusqu'à présent, on va en prison pour des actes ou crimes pour lesquels on a été reconnu coupable par un tribunal d'exception ou pas, mais non pour ce que l'on est et au nom de sa propre dangerosité supposée.
Depuis 1986, tous les gouvernements de l'État français, de droite comme de gauche, se sont employés à faire voter des lois liberticides sous le prétexte de se protéger du terrorisme. De loi en loi, vingt ans après, l'exception dans la justice française a pris de plus en plus de place et cela au détriment des libertés individuelles. Cette nouvelle loi n'est que l'aboutissement de la dérive permanente de la limitation des Droits de l'Homme dans la patrie auto-proclamée des Droits de l'Homme et pourtant bien trop souvent donneuse de leçons aux autres. Cette nouvelle peine, qui ne connaît pas de limite dans le temps, s'apparente à une véritable "lettre de cachet" qui permettait, durant la monarchie absolue, l'incarcération sans procès, comme la prison à vie pour le "crime" de protestantisme.
Le règne Sarkozy – Dati marquera l'histoire pour ses atteintes aux Droits de l'Homme, ne fallait–il pas s'y attendre ?
Pour la LBDH
Michel Herjean