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- Chronique -
Toponymie bretonne en danger : la colère monte
Les messages d'indignation qui remontent actuellement traduisent une prise de conscience de l'étendue du drame culturel qui se déroule devant nos yeux et depuis longtemps déjà. La langue bretonne recule comme si c'était une chose naturelle. Avec retard, sans doute, mais le peuple relève la tête et demande des comptes.
Yvon Ollivier pour Yvon Ollivier le 4/06/24 9:48

A lire les nombreux messages d’indignation et d’expérience personnelle qui remontent, nous prenons mieux conscience du drame culturel qui se déroule devant nos yeux.

De manière imperceptible, les uns après les autres, et depuis de nombreuses années, nos lieux-dits bretons s’effacent de manière presque naturelle.

C’est comme si la « civilisation supérieure », condensé de langue française, de rationalisme et de consumérisme victorieux, prenait le pas sur la vieille « langue des ploucs » jusqu’au plus profond de nos campagnes.

L’habitude de courber l’échine, héritière de siècles de domination culturelle et éducative, est pour beaucoup dans la complaisance ou la résignation des Bretons, jusqu’au sein des Conseils municipaux.

Le sens de la saisine de l’UNESCO par Koun Breizh est de rappeler à tous ce drame culturel et identitaire que l’on préfère passer sous licence. Surtout, il s’agit de dire à la face du monde que notre langue est aussi digne qu’une autre, et qu’elle doit être protégée à l’égal de celles des Indiens du Canada dont la toponymie ancestrale est désormais sacralisée.

Dans le fameux plan Marshall des langues -celui qui sommeille dans les tiroirs à la Région- nous avions fixé comme objectif le recensement précis et la protection intégrale de l’ensemble de nos toponymes en langue bretonne. Il était sans doute trop tôt pour convaincre. Pourtant en 2019, la mobilisation des artistes et du mouvement culturel avait pu venir à bout de la francisation de Telgruc-sur-mer.

Aujourd’hui plus que jamais, il nous faut remonter la pente car la loi 3DS a encore accru la tendance lourde à la débretonnisation/francisation de notre territoire.

Nous connaissons le problème : les petites communes dépourvues de moyens ploient sous la lourdeur administrative. On leur demande de modifier à la va-vite leur adressage en donnant un nom à toutes les voies, en prenant bien garde de faciliter la tâche de l’ensemble des services. Pour cela, bien sûr, c’est le français qui prime car la modernité ne saurait être que française ! Les communes n’ont d’autres choix que de contractualiser avec des prestataires, dont la Poste, qui proposent clé en main un adressage maison avec listing de noms bien français pour nos nouvelles voies. Et ça marche. Nos municipalités, par légitimisme, fatigue, résignation, inculture, ou parfois par malveillance paient pour débretonniser leur territoire !

Aujourd’hui les Bretons ont compris ce que ça voulait dire. Le 1er juin, c’est l’ensemble du mouvement culturel breton qui s’est constitué en collectif pour dire non ! Nous sommes tous comptables de ce qui se passe sous nous yeux, la Poste, nos municipalités, la région, nos élus, le peuple. Que l’on arrête de se défausser les uns sur les autres !

La mobilisation commence et elle prendra du temps. Nous avons lancé un appel au peuple pour faire remonter la destruction de nos lieux-dits et sollicité l’appui de militants au sein des communes : contact_ toponymie-bretonne [at] kmel.bzh . Nous rendrons publics tous ces éléments.

Le 11 juin prochain à Paris nous rencontrerons le Président Directeur général de la Poste, Philippe Wahl, pour lui faire part de notre indignation et surtout, pour exiger le moratoire sur la loi 3DS, tant que des garanties ne seront pas données sur le respect intégral de notre toponymie.

On a suffisamment détruit.

La mobilisation a déjà payé car la Poste vient d’accepter de donner à ses commerciaux une formation à la préservation de la toponymie bretonne par l’OPAB. Fin avril dernier, le syndicat mixte Mégalis en charge de la fibre a modifié son site internet qui plaçait la préservation de la toponymie bretonne parmi les mauvaises pratiques…

Mais nous devons obtenir davantage et surtout la réparation intégrale.

Il va falloir réparer et redonner vie à l’ensemble de nos lieux-dits en langue bretonne. Pas un seul de nos lieux-dits ne doit finir dans les poubelles de l’histoire. L’adressage doit être refait selon les règles posées par l’OPAB. Nous solliciterons l’appui de la Poste, de la région Bretagne et nous irons voir les municipalités compétentes, l’une après l’autre. Et s’il faut financer cette remise en état, nous trouverons les financements.

Nous manifesterons là où ce sera nécessaire.

Comment prétendre un jour sauver la langue bretonne si nous laissons faire cette destruction d’humanité ? Comment accepter une rue des alouettes en lieu et place d’un toponyme significatif dans notre langue, vieux de 1 500 ans, qui nous relie à nos ancêtres et nous rappelle que nous sommes un peuple, cette vérité que l’on veut nous taire aujourd’hui ? Mais quelle est donc cette civilisation qui jette aux orties son histoire et son âme pour mieux laisser passer Amazon ? Ceux qui nous disent qu’il faudrait gagner quelques secondes de plus pour nos ambulances, sont les mêmes qui disent qu’il faut fermer les hôpitaux en Bretagne ! Tout n’est que duplicité et mensonge !

Cette mobilisation que nous lançons s’inscrit dans la lutte perpétuelle de l’humanité contre les forces de domination mais encore contre l’insondable bêtise humaine.

Yvon Ollivier

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Yvon OLLIVIER est juriste, auteur de l'ouvrage "la désunion française essai sur l'altérité au sein de la République" ed l'harmattan 2012 et membre de la coordination des juristes de Bretagne blog associé desunion-francaise.over-blog.com
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Vos 4 commentaires
Philippe Lanoë Le Mardi 4 juin 2024 14:31
pour mémoire la question des nouveaux noms de communes avait été abordée en 2018 par BCD. Voir notamment une analyse des enjeux politiques des noms de lieux :
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Anne Merrien Le Mardi 4 juin 2024 17:07
La Poste semble à l'écoute. Cette entreprise se rend compte que l'incurie des conseils municipaux nuit à son image. La Poste va-t-elle sauver la toponymie bretonne à la place des Bretons ?
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Penn Kaled Le Mardi 4 juin 2024 18:16
Une conséquence de cette loi, les automobilistes seront obligés de mettre à jour leur carte grise. Votre organisation ne pourrait t-elle pas mettre à profit cette tracasserie supplémentaire, qui en plus touche le portefeuille, pour faire prendre conscience à la population la nécessité de sauvegarder la toponymie.Cette démarche provoquerait une pression sur les élus locaux, cet argument à la capacité d'inverser le cours des évènements,à condition d'intervenir rapidement.
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Christian Rogel Le Mercredi 5 juin 2024 22:20
Maël Reboux était à Vannes, mais il y était en tant qu’expert geomaticien d’une collectivité, mais sans qu’il puisse développer le grand intérêt de la base de données OpenStreetMap.org qui permet de stocker les toponymes et, sous leur forme officielle, et c’est la forme par défaut, et sous leur forme bretonne, et ça passe par name:br.
On peut afficher une carte avec les étiquettes name:br en allant sur kartenn.osm.bzh.
Les applications GPS basées sur OSM peuvent être interrogées avec les noms en breton sans les afficher, mais OSMAnd qui permet de visualiser le breton.
Pour savoir qu’il y 251 000 éléments géographiques avec un nom en breton : et tapez name:br..
(0)  Envoyer un mail à Christian Rogel

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