Hier, je me suis rendu chez monsieur le curé. Et oui, au bourg de Porspoder, nous avons encore un curé, une rareté puisqu'il paraît qu'il ne reste plus que 35

Hier, je me suis rendu chez monsieur le curé. Et oui, au bourg de Porspoder, nous avons encore un curé, une rareté puisqu'il paraît qu'il ne reste plus que 35 curés en activité dans le Finistère. Vous me direz, mesdames, messieurs, tout fout le camp. Et oui ! Où sont les milliers de prêtres que le Finistère comptait encore dans les années 50 et les dizaines de milliers qui peuplaient la Bretagne. Il y en avait tant que la Bretagne en envoyait partout en France et dans le monde. Et maintenant plus rien. Et en plus, ils sont en majorité vieux.

Donc, je me suis rendu chez le curé pour lui demander un service. Rassurez-vous, pas pour moi, mais pour une grand'tante, âgée de 98 ans – il paraît que c'est la doyenne du village- mourante. Sans enfant, c'est moi qui m'en occupe. En lui donnant du « mon père », je lui ai demandé de se rendre à son chevet pour lui donner les derniers sacrements, l'extrême-onction. Qu'ai-je fait là, messieurs-dames ? Mais c'est que je l'ai dérangé, le bon père. L'accueil fut glacial. Il a fallu insister. Et mes bras m'en sont tombés lorsqu'il m'a demandé si la famille était en prière auprès de ma pauvre tante – une ancienne « bécassine » (elle a inspiré mon livre) très croyante et très pratiquante. Le « pauvre bon père » s'imaginait-il revenu au bon vieux temps où tous les membres de la famille étaient agenouillés autour du lit mortuaire priant tous ensemble, attendant dans la dévotion ancestrale, l'arrivée du curé ? Bref, je me demande sérieusement s'il ne s'est pas cru au siècle passé. Il est vrai que ma demande était saugrenue. Pour finir, il m'a proprement fichu à la porte.

Sont-ils tous comme cela les curés d'aujourd'hui ? Nous savons qu'ils sont vieux, pour beaucoup d'entre eux. Mais vivent-ils dans le passé, dans un passé glorieux où ils dominaient la société, une société où on les adorait ou on les détestait ? Aujourd'hui, on s'en fiche complétement. Savent-ils que la majorité des enfants de 12 ans des paroisses les plus pratiquantes de Bretagne ne connaissent strictement rien du christianisme ? Bien sûr ils connaissent le nom de Jésus, mais le nom du Christ, c'est une autre histoire. Est-ce bien ou est-ce mal ? Le problème est qu'un pan entier de la culture s'est écroulé, et bien sûr de la culture bretonne.

Et où sont les curés ? Repliés ou peut-être même terrés dans leurs magnifiques presbytères et celui de Porspoder est très beau, avec une des plus belles vues sur mer de Bretagne ? Qu'ils ne connaissent pas leurs paroissiens, on veut bien puisqu'aujourd'hui, ils s'occupent d'au moins une dizaine de paroisses. Qu'ils ne cherchent pas à les connaître, pour le cas de ce curé, c'est clair et net. Mais de là à ne plus s'occuper de leurs paroissiens pratiquants, je dois avouer que c'est un peu choquant. Je me demande bien ce qu'il fait alors : est-il plongé dans ses prières ? Ecrit-il des livres de théologie ? Ses mémoires ? Prépare-t-il une Mission d'évangélisation ? S'occupe-t-il uniquement de ses ouailles qui viennent à lui ? Fait-il le tri entre ceux qui sont importants et ceux qui ne le sont pas ? Mais selon quel critère ?

La semaine dernière, je me suis rendu à l'enterrement religieux de ma voisine, très pratiquante elle aussi. Le service était rendu par des diaconesses. Pas de curé. Je peux vous dire qu'à la sortie, les vieux en ont parlé. Si comme certains, vous croyez que vous allez avoir un prêtre pour le service de votre enterrement, vous vous trompez lourdement. A l'allure où cela va, si vous avez une diaconesse, vous aurez bien de la chance. Peut-être n'aurez-vous qu'une vidéo ou un hologramme ? Un robot ? Mais je m'égare.

Monsieur le curé, savez-vous que les églises sont vides ? Et ce n'est pas avec les comportements de la corporation ecclésiastique que cela va s'améliorer. Un de mes amis, aujourd'hui prêtre, trop moderne, trop intello, a eu un mal de chien à être ordonné. Et oui, les vocations ne sont pas encouragées. Les églises sont vides, les monastères sont transformés en maisons de retraite, les biens des congrégations religieuses – et dans de nombreuses communes bretonnes, elles en étaient très bien pourvues - sont vendus massivement. Et pourtant, il y a un an, j'ai assisté à une messe de communion, rigolote, pleine de vie, où les assistants même maladroitement participaient. L'église était pleine à craquer. Et le prêtre, jeune, venait d'Afrique...

Monsieur le curé, savez-vous qu'il y a une autre religion monothéiste, un peu moins compliquée ? Parlez aux enfants de 12 ans de la sainte Trinité, vous allez adorer les réactions. Pour certains, Jésus est un alien. Savez-vous monsieur le curé que de bons Bretons et de bonnes Bretonnes se convertissent à l'Islam et que certains partent en Syrie ? Savez-vous que cette religion en pleine expansion, manquant de lieux de prière, lorgne sur vos églises ?