Bretons de Shanghai 1er janvier 1936 - Alain  Lucia ; François Berthier.
Bretons de Shanghai 1er janvier 1936 - Alain Lucia ; François Berthier.
Bretons de Shanghai 30 juillet 1939 (1).
Bretons de Shanghai 30 juillet 1939 (1).
Bretons de Shanghai 30 juillet 1939 (2) - Lucia  Robert.
Bretons de Shanghai 30 juillet 1939 (2) - Lucia Robert.
Bretons de Shanghai 30 juillet 1939 (3).
Bretons de Shanghai 30 juillet 1939 (3).

Je m'appelle René Berthier et je suis un de ces Bretons qui n'a jamais vécu en Bretagne. Mon père, Robert Berthier, est né à Saint-Malo en 1893. Moi, je suis né à Shanghai en 1946. Ma grand-mère, Marguerite Le Cocguen, était une malouine née en 1870. Elle était issue d'une famille assez connue dans la région. Son grand-père, Édouard Legros, avait fondé les bains de mer de Dinard en 1858.

27 avril 2009

Je m'appelle René Berthier et je suis un de ces Bretons qui n'a jamais vécu en Bretagne. Mon père, Robert Berthier, est né à Saint-Malo en 1893. Moi, je suis né à Shanghai en 1946.

Ma grand-mère, Marguerite Le Cocguen, était une malouine née en 1870. Elle était issue d'une famille assez connue dans la région. Son grand-père, Édouard Legros, avait fondé les bains de mer de Dinard en 1858. Marguerite épousa un marin de Saint-Malo, François-Marie Berthier, qui mourut trois ans plus tard en la laissant seule avec deux enfants, dont mon père. Berthier n'est pas un nom breton.

Mon ancêtre Pierre Berthier, jardinier originaire d'Orléans, a épousé une fille de Paramé le 24 avril 1713. Il y a énormément de Berthier dans le coin, et je pense qu'ils descendent tous de lui. Legros non plus n'est pas un nom breton. Pierre-Louis Legros, de Pontoise en région parisienne, était canonnier au 8e régiment d'artillerie à pied. Il arriva à Saint-Malo pour défendre la ville contre les Anglais un jour de 1793. Il épousa une fille du coin, Marie-Josèphe Harlet, fille d'un marin décédé en mer. Il y a pas mal de Legros aussi, dans la région de Saint-Malo, qui doivent descendre du canonnier (par ailleurs viticulteur).

La retraite venue, j'ai écrit une histoire de ma famille, accessible sur Internet. Je voulais rendre hommage à ma grand-mère Marguerite, qui était un personnage étonnant. Devenue veuve, avec deux enfants dont mon père, elle est partie en Pologne comme gouvernante au tout début du XXe siècle. Elle ne s'y plut pas. Au lieu de rentrer à Saint-Malo, elle prit la direction opposée. En 1908 elle est à Vladivostok, en Sibérie orientale, où elle épouse un… Ariégeois.

En septembre 1914 mon père, Robert Berthier, quitte Vladivostok pour s'engager. Il sera blessé, gazé dans les tranchées. De retour chez lui – Vladivostok – en 1919, il rempile est et affecté au Corps expéditionnaire français en Sibérie. Libéré en 1923. La famille quitte la Sibérie en juin 1921 pour s'installer en Chine du Nord, à Tientsin. C'est là que ma tante Raymonde, née à Saint-Malo, épouse un marsouin de Saint-Brieuc, Jean Benoît. Marguerite Le Cocguen meurt à Shanghai en 1936. Elle avait tenu un journal, qu'elle brûla avant de mourir. Mon père, devenu policier dans la concession française de Shanghai, épouse ma mère, une Italienne, en 1925. Ils auront trois enfants, dont moi, le dernier, né en 1946.

Mon oncle Loïc Raufast, fils issu du second mariage de Marguerite et né à Vladivostok en 1917, ne mit les pieds en Bretagne que le 5 juin 1944. Il y arriva en parachute. Il n'était pas tout seul, et lui et ses camarades se retrouvèrent à la ferme de la Nouette, près de Saint-Marcel dans le Morbihan. Il était dans les SAS britanniques et faisait partie du groupe Marienne. Il fallait empêcher les 150.000 Allemands qui occupaient la Bretagne de rejoindre ceux qui se trouvaient en Normandie. Après la Bretagne, ce fut la bataille des Ardennes, puis l'opération Amherst aux Pays-Bas. Il fut le militaire le plus décoré de l'armée française. C'est aussi cette histoire-là que je raconte. Mon oncle Loïc ne douta jamais qu'il fût un Breton.

Bien sûr, mon livre rend également hommage à ma mère, une Italienne dont la vie fut elle aussi extrêmement mouvementée.

Cependant, j'ai pensé que cette histoire pourrait intéresser quelques-uns de vos lecteurs. Elle raconte l'histoire de ces expatriés qui n'oublièrent jamais qu'ils étaient bretons. Mon neveu Philippe Berthier, un arrière-petit fils de Marguerite, né au Cambodge, qui a vécu en Indonésie et au Brésil, vit maintenant sur un voilier dans la baie de Chesapeake aux États-Unis : il a créé une association de Bretons et organise des concerts de musique celtique et des festoù noz. Lui non plus n'a jamais vécu en Bretagne…

Si cette histoire pouvait être lue par des Berthier et des Legros de Saint-Malo et des alentours, je serais heureux d'entrer en contact avec eux. Peut-être ont-ils des documents, des photos, peut-être des anecdotes sur ma famille ont-elles survécu.

Je vous joins pour information quelques photos prises dans les années trente dans le cadre des activités de l'association des Bretons de Shanghai. Sur l'une d'elles on voit clairement un drapeau avec l'hermine et le mot « Armor ».

L'histoire se trouve sur Internet, sur le site lulu.com. Le titre du livre est :

Cilù, une histoire dans le siècle

Cilù, c'est comme ça qu'on appelait ma mère, Lucia.