L'Odyssée des mots, organisée par les médiathèques de Quimper-Communauté accueille, jusqu'en février, une manifestation d'envergure sur le thème "Osez dire dire non à l'indifférence" proposée par les éditions Actes Sud Junior.
Une thématique à laquelle les auteurs bretons sont sensibles et qu'ils explorent avec constance dans leurs écrits. Mais aucun auteur de Bretagne n'a été invité à mêler sa voix pour "dire non à l'indifférence",les six auteurs programmés aux lectures, rencontres et ateliers d'écriture étant issus du seul collectif d'auteurs des éditions d'Actes Sud Junior.
La revue Spered Gouez a reçu cette "lettre ouverte" de Catherine Marc, membre de l'association Ker-Hars, aux organisateurs de cette manifestation. Il nous semble intéressant de la publier ici, afin de susciter le débat et l'échange de points de vue.
De l'indifférence à l'exclusion
Comment être neutre quand on a vu placardée d'une rue à l'autre, l'affiche qui sur chaque livre déploie les lettres « osez : » et le reste de la phrase: « dire non à l'indifférence! » . Elle est actuelle, l'indifférence, et plus fort encore l'acte d'exclusion ! Aucun auteur quimpérois ou des alentours n'est invité à être un de ceux qui savent dire non à l'indifférence. Seraient-ils eux- mêmes des indifférents ? Est-ce la signification induite dans le choix de cette thématique ? Ou serait-ce plutôt l'institution qui veut l'ignorer ? Pas facile effectivement d'être confronté à ceux, qui aujourd'hui disent non, là, sur le parvis de la cathédrale.
Comment peut-on vivre alors décemment chez soi ? Quelle est la place que la politique culturelle quimpéroise donne à ses artistes ? L'indifférence étant là, présente, dans le quotidien, dans la proximité au sein même de l'Odyssée des mots. Justement c'est cette réalité là qui est un paradoxe : aller chercher ailleurs, avec d'autres auteurs et ne faire aucun effort pour donner ne serait-ce qu'un minimum de place, à ceux qui ici, vivent, créent, portent et passent le flambeau de notre riche culture, au quotidien des mots écrits au présent. Ce propos ne va pas contre le fait d'inviter ces auteurs, mais bien contre le fait de laisser de côté les auteurs de Bretagne – « les régionaux » de l'étape dont les écrits, parce que d'ici, n'auraient aucune portée universelle ? - C'est encore, aujourd'hui, hélas comme hier de sinistre mémoire, arracher à la culture "locale" cette place dans le concert de l'humanité de l'intelligence humaine. C'est le déni du citoyen, même si on l' invite à participer, le déni du travail et du contribuable, le déni de l'artiste, le déni des auteurs et créateurs bretons.
L'affiche devient alors celle du cauchemar, de l'indécence, quand en plus on choisit des écrivains pour les « juniors » ! comme si le thème était trop scabreux pour être proposé à l'adulte. Un seul « grand » Editeur ! On a donc besoin d'un audimat sélectif ! On raconte le passé, personne ne s'y oppose, mais en occultant le présent. Pourtant exprimer l'indifférence devrait être justement le fruit d'un travail fédérateur. Cela devrait être une politique qui met l'accent sur la création comme levier social , comme incitation à aller vers la connaissance, vers l'information, vers plus d'humanité.
Les artistes, les auteur(e)s sont souvent le socle essentiel pour interroger notre société sur les injustices. Et il n'existe pas de désert breton ni quimpérois sur la question. Quel est donc ce prix du « non à l'indifférence ? Et d'une manière générale que fait Quimper pour ses créateurs et ses citoyens indignés d'être ainsi relégués au rôle passif de ceux qui doivent recevoir car incapables d'enrichir l'échange ?
Catherine Marc