Il y a un an, le SNP, le Parti national écossais, gagnait les élections au Parlement écossais par une courte majorité relative d'un siège, détrônant pour la première fois le Parti Travailliste britannique.
Douze mois plus tard, cette victoire semble avoir transformé de façon durable le paysage politique écossais : Alex Salmond et le SNP n'ont jamais été aussi populaires et les Travaillistes aussi bas dans les sondages. Parallèlement, Alex Salmond, un tacticien politique hors pair, avance à petits pas sur la voie de l'indépendance, en marginalisant le gouvernement de Westminster dans de nombreux dossiers, en menant une politique extérieure indépendante et en réaffirmant sa volonté de proposer un référendum en 2010 sur l'avenir institutionnel de l'Écosse.
Conscient que l'indépendance ne pourra être gagnée qu'en prouvant l'efficacité d'un gouvernement nationaliste, A. Salmond mène depuis un an une politique que l'on pourrait qualifier de « nationalisme pragmatique et ouvert », mêlant réalisme économique et solidarités sociales, ouverture vers les autres partis présents au Parlement d'Edinburgh et collaboration minimum avec le gouvernement de Londres.
Ce savant cocktail lui a notamment permis de faire voter son premier budget à l'automne 2007 avec l'appui tacite des élus conservateurs, au grand dam des Travaillistes.
Parallèlement, A. Salmond a lancé l'été dernier une grande consultation nationale en vue du référendum de 2010 sur les 3 axes qui seront alors proposés aux Écossais : l'indépendance, le renforcement des pouvoirs du Parlement d'Edinburgh, le statu quo. En réponse à cette initiative, les 3 partis unionistes, les Conservateurs, les Travaillistes et les Libéraux-Démocrates, signaient un pacte dans le but d'empêcher ce référendum et créaient une commission indépendante sur le thème du renforcement des pouvoirs du Parlement écossais.
Ce pacte, déjà mis à mal par le soutien des Conservateurs au budget proposé par le gouvernement nationaliste, a été de nouveau remis en question la semaine passée du fait, cette fois-ci, du Parti Travailliste.
Dirigé depuis les élections de 2007 par Mrs Wendy Alexander (dont le frère Douglas est par ailleurs membre du cabinet de Gordon Brown), le Parti Travailliste s'est trouvé en permanence sur la défensive face au gouvernement d'Alex Salmond, des Travaillistes incapables de remettre en cause la politique du SNP et reculant mois après mois dans les sondages.
Face à cette situation désastreuse, Mrs Alexander a tenté un « coup » politique le 4 mai dernier qui a finalement provoqué un véritable séisme au sein du Parti Travailliste britannique et dans le paysage politique écossais : persuadée que, si on laissait du temps au SNP pour organiser son référendum en 2010, les Nationalistes pourraient le gagner, Wendy Alexander a pris le contre-pied total de la position du Parti Travailliste anti-référendum pour proposer, au contraire, l'organisation d'un référendum « Yes or No » à l'indépendance écossaise dans les plus brefs délais ….. Sans avoir averti la direction londonienne du Parti Travailliste, ni Gordon Brown, ni les autres partis unionistes.
Ce retournement de la position des Travaillistes écossais a provoqué l'ire des Conservateurs, accusant les Travaillistes de « traîtrise », celle des Libéraux-Démocrates qualifiant cette position de « cadeau » à Alex Salmond et enfin celle de Gordon Brown, obligé de lâcher son amie et alliée Wendy Alexander en plein débat au Parlement de Westminster en affirmant qu'il était hors de question d'organiser rapidement un référendum sur la question de l'indépendance écossaise.
Malgré ces attaques, Mrs Alexander et ses collègues travaillistes d'Écosse ont maintenu durant toute la semaine dernière leur position en affirmant qu'il était temps que les Écossais aient la parole sur ce sujet fondamental pour leur avenir et que cela permettrait d'en finir avec un sujet qui « pourrissait » la vie politique écossaise.
Jeudi dernier, Gordon Brown et la direction londonienne exigeaient que les Travaillistes écossais reviennent en arrière et abandonnent cette idée de référendum à court terme, demande rejetée par Wendy Alexander.
Cette crise a trouvé son dénouement ce 11 mai avec une intervention télévisée de Wendy Alexander qui indiqua abandonner l'idée d'un référendum à court terme mais qui, à la surprise de tous, se ralliait au projet d'Alex Salmond d'un référendum en 2010 avec les 3 questions indiquées ci-dessus…..
Ainsi en moins de dix jours, les Travaillistes écossais passaient d'une opposition totale à tout projet de référendum au soutien du projet du SNP : Alex Salmond ne pouvait imaginer mieux comme « cadeau » au bout d'un an au poste de Premier Ministre d'Écosse : une popularité à la hausse, le soutien des milieux d'affaires et enfin le ralliement du Parti Travailliste écossais à son projet de référendum sur l'indépendance en 2010.
De plus, la fracture entre les Travaillistes écossais et la direction londonienne signe une évolution que Nicolas Sturgeon, vice-premier ministre d'Écosse (SNP) a qualifiée de « très positive » et « quasi-nationaliste ».
Le SNP ne pouvait rêver mieux pour aborder sa seconde année à la tête de l'Écosse.
Enfin, dans un ultime revirement, et sous la pression de Londres, une majorité des membres travaillistes du Parlement écossais désavouaient ce mardi 14 mai les positions erratiques de leur leader Wendy Alexander , affaiblissant un peu plus l'image du Parti Travailliste en Ecosse.