Collectif BRETAGNE MAJEURE Le 23 Mars 2022.
BREIZH MESTR WAR HE ZRAOÙ
UNE BERTEGN QI MENE SON DRAO
22 ru ar feutan/rue de la fontaine
56870 BADENN
Lettre ouverte à Monsieur Chesnais-Girard
Président de la Région Bretagne
Monsieur le Président,
Comme beaucoup, vous avez vu que les lignes bougent ces temps-ci. L’Histoire reprend ses droits avec la guerre qui sévit en Ukraine. Même le peuple corse fait desserrer l’étau nationaliste français en forçant le pouvoir à acter le principe d’autonomie.
L’autonomie devrait être la normalité partout où vivent les hommes libres et égaux en droit. Pour les hommes comme pour tous les peuples, la liberté devrait être le principe alors que la Bretagne souffre d’un centralisme déshumanisant depuis plusieurs siècles.
Ce centralisme étouffant et dogmatique a généré des inégalités terrifiantes entre les hommes, les cultures et les territoires, et des politiques liberticides au point de nous faire perdre l’usage de nos langues et la connaissance de notre histoire, de créer des inégalités socio-économiques insupportables pour les populations au sein de l'Hexagone, mais aussi au cœur de la Bretagne (cf. le problème actuel du logement sur la côte et dans nos cités). Ce centralisme a créé une caste de privilégiés et de technocrates, domiciliés à Paris le plus souvent, et qui ne souhaite pour rien au monde une évolution démocratique.
Et pourtant, Monsieur le Président, l’autonomie reste plus que jamais le sens de l’Histoire malgré les résistances des systèmes centralistes et dominateurs.
La Bretagne abrite un très vieux peuple dont vous avez aujourd’hui la charge, via ce que le droit français nomme « région administrative ». Rien ne justifie que le peuple breton reste étranger au grand mouvement d’émancipation historique des peuples et des territoires.
Vous-même, n’avez-vous pas évoqué la nécessité de « plus de Bretagne » et la création d’une « Assemblée de Bretagne » avant les dernières élections régionales ? Nous savons tous qu’il en va de l’intérêt des Bretonnes et des Bretons.
Si, à plusieurs reprises depuis que vous êtes aux affaires, vous avez évoqué l’intérêt de davantage de compétences dévolues à la région, jamais vous n’avez esquissé la moindre initiative politique forte pour émanciper notre peuple au sein d’une Bretagne réunifiée !
Il ne suffit pas d’expédier un document à Paris pour quémander l’octroi d’un pouvoir réglementaire aux régions pour nous faire croire que vous êtes favorable à l’autonomie de la Bretagne. L’autonomie consiste à prendre en charge toutes les affaires qui nous concernent avec la fiscalité et le budget nécessaire. Elle va bien au-delà d’un pouvoir règlementaire octroyé dans le champ de compétences régionales dérisoires.
Les occasions n’ont pas manqué pour le pouvoir socialiste à la Région de s’emparer de ce sujet, à l’issue du mouvement des Bonnets rouges, comme récemment encore avec la crise liée à la décision humiliante du Conseil constitutionnel rejetant le principe de l’immersion linguistique. Que d’occasions manquées !
Vous n’aimez pas beaucoup faire du bruit, dites-vous. Il est vrai que l’on vous entend peu sur les sujets cruciaux pour la Bretagne.
Vous vous êtes réservé la compétence institutionnelle. Mais pour en faire quoi ?
Car c’est aujourd’hui qu’il vous faut réagir pour faire entendre la voix de la Bretagne, alors que les Corses ont trouvé l’énergie de secouer, enfin, le dogme souverainiste qui a causé tant de blessures et de souffrances.
Votre silence, au prétexte qu’on ne saurait débattre que dans le calme, est désarmant. Nous le trouvons faux et indigne du peuple breton.
Attendrez-vous la veille des futures élections régionales pour promettre à nouveau ?
La duplicité des responsables politiques est la pire des choses pour nos concitoyens, car elle les décourage de la citoyenneté.
Vous venez de signer le Contrat de plan État-Région avec Mr le Premier Ministre pour acter l’octroi de 900 000 euros à la Bretagne sur une période de six années. Vous devez connaître le budget d’une grande Région d’Europe normalement émancipée, comme la Catalogne ou le Pays de Galles. Alors pourquoi cette mascarade ?
Comment avez-vous pu accepter, sans rien dire, un tel « contrat » qui confine à l’humiliation ?
S’il est dans la nature de la France de nous humilier avec des « épluchures », il est indigne de les accepter.
Si cette indignité ne vous fait pas peur, sachez qu’elle nous révolte.
Plus que jamais, le système centralisateur et autoritaire ne repose que sur des gens qui acceptent de le subir, pour le statut ou les avantages personnels qu’il procure.
Alors que les Ukrainiens se battent, que les Corses relèvent la tête, que d’autres Régions périphériques de l'Hexagone remettent en cause ce carcan centraliste qui étouffe toute vie sociale et économique, vous consentez à la ruine de nos libertés. Tout se passe comme si vous étiez la caution bretonne de notre privation de droits, de notre spoliation et de la mort progressive de nos langues.
La présence de « régionalistes » à vos côtés ne légitimera pas longtemps votre inaction sur le terrain de l’émancipation démocratique de notre vieux pays.
Surtout, Monsieur le Président, les Bretonnes et les Bretons savent qu’ils ne forment pas une « région », mais un peuple d’Europe, comme n’importe quel autre peuple et tout aussi digne que les autres.
Ils ont la mémoire longue des peuples opprimés. Or, une des règles de base en matière géopolitique est le fait que la mémoire d’un peuple n’oublie jamais, quel que soit le temps écoulé, toute forme d’humiliation, de domination, d’infamie.
Il est plus que temps que vous éleviez la voix et trouviez le positionnement naturel au premier responsable politique de Bretagne, consistant à recouvrer l’autonomie perdue, dans le cadre d’un rapport de force politique.
BRETAGNE MAJEURE.
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