Les habitants de Loire-Atlantique, cinquième département breton, sont appelés à voter le 26 juin prochain sur le transfert de l’aéroport de Nantes-Atlantique vers le site de Notre-Dame-des-Landes. Cette consultation, décidée par l’Etat, doit permettre de sortir de l’impasse dans laquelle ce projet s’est retrouvé, du fait de l’hésitation à le mettre en œuvre, face à des opposants qui en ont fait un instrument d’affrontements idéologiques et politiciens au détriment de l’enjeu initial de développement régional.
Il nous faut bien constater que les localismes cautionnent de fait le centralisme parisien, les deux se confortant l’un et l’autre dans le refus du nouvel aéroport et faisant système pour que rien ne change. Pour nous, ce débat est aussi celui d’une vision de la décentralisation, une décentralisation véritable qui reste à faire, qui reconnaisse et accepte l’autonomie de développement des régions et de leurs métropoles urbaines, et ainsi mette un terme à leur maintien sous perfusion, en état de dépendance du niveau central.
C’est pourquoi, Nous, citoyens de Bretagne et de la diaspora bretonne, porteurs d’une ambition à la fois régionale et internationale pour la Bretagne, lançons un appel pour le OUI au projet d’aéroport international de Notre Dame des Landes (NDDL).
Nous voulons remettre au cœur du débat public l’enjeu stratégique qui légitime un tel équipement pour notre territoire.
Nous considérons que la Bretagne doit pouvoir se connecter à l’international sans passer obligatoirement par Paris, et avoir la maîtrise et les atouts de son développement. Nous ne pourrons pas relever ce défi à partir de l’offre aéroportuaire existante, même optimisée.
Saisissons l’opportunité qui nous est offerte de doter la Bretagne d’un aéroport international à fort potentiel répondant aux enjeux modernes, y compris ceux du développement durable. Approprions-nous ce projet pour le mettre au service de cette formidable péninsule océanique à la tête de l’Europe, ce territoire reconnu disposant d’un fort potentiel civique, démocratique et de développement ainsi que de rayonnement à l’international : la Bretagne réunifiée !
Nous considérons que ce projet est primordial pour assurer le développement de la Bretagne sur le long terme, en insérant notre région au cœur des échanges européens et en lui offrant la capacité de développer à l’avenir des vols intercontinentaux.
En France, le transport aérien international est très largement structuré par la centralisation parisienne : un hub aéroportuaire au centre, en position de quasi-monopole pour l’accès à l’international (Europe et intercontinental), hors charters et low-cost, alimenté par de petits aéroports provinciaux, ainsi que par le réseau de TGV.
Le nombre de navettes Paris-province imposé par ce modèle (plus de 20.000 par an au départ des seuls aéroports bretons !), situation unique en Europe quand ailleurs le trafic vers l’international est bien mieux distribué, a un impact considérable sur le plan climatique, que les opposants au projet de NDDL préfèrent en général ignorer. Leur coût pèse également sur le développement économique des régions périphériques et pousse les entreprises nécessitant un accès à l’international à s’implanter directement en région parisienne.
Cette situation qui est bien évidemment le fruit d’une tradition politique française centralisatrice est aussi le résultat du lobbying d’Aéroports de Paris et surtout d’Air France-KLM dont les vols réguliers organisent le hub de Roissy-CDG. Il est d’ailleurs intéressant de remarquer que Roissy-CDG est engagé dans un projet d’extension colossal, qui ne suscite aucune opposition notable de la part des mouvements écologistes, souvent parisiens, qui sont les plus mobilisés contre NDDL.
Ainsi, le patron d’Air France-KLM expliquait l’année dernière que « La desserte intercontinentale directe des villes de province par des compagnies étrangères est une stratégie extrêmement pénalisante pour le hub d’Air France ». Les Échos (9 mars 2015). L’Union des Aéroports Français (UAF), ne partageant pas cette position considérée comme du protectionnisme, avait alors rétorqué que « les chefs d’entreprise ont clamé ne pas vouloir être pris en otage par une compagnie, quelle qu’elle soit, qui voudrait leur imposer des contraintes inutiles dans leurs déplacements ».
A cet égard, les annonces récentes de la compagnie Air France-KLM du lancement d’une liaison Rennes-Amsterdam (hub européen de KLM) ou d’un vol Lorient-New York, via Orly, apparaissent surtout comme une tentative de délégitimer la création d’un aéroport international d’envergure à Notre-Dame-des-Landes risquant de faciliter l’implantation de ses concurrents, en mettant soudainement en valeur en Bretagne sa politique de hub. C’est également l’objectif évident du collectif des 200 pilotes d’Air France-KLM contre NDDL dont bien peu opèrent en Bretagne.
Quant à son coût qualifié par ses opposants de « gaspillages », il est moitié moindre que la réhabilitation à elle seule des halles de Paris, dont le montant dépasse allègrement le milliard d’euros. Cela alors qu’il s’agit de construire un aéroport international, à vocation intercontinentale, de décentraliser du transport aérien, de doter une région d’un équipement majeur pour son développement, connecté aux aires métropolitaines. Excusez du peu.
Si la réalisation de l’aéroport de NDDL s’impose plus que jamais comme une nécessité, c’est d’abord pour accompagner les dynamiques de développement que connaissent les métropoles urbaines de Nantes et Rennes, sans oublier l’agglomération vannetaise. Avec une clientèle provenant déjà très majoritairement du nord de la Loire et avec un potentiel de développement encore plus grand dans cette direction, transférer l’aéroport de Nantes à Notre-Dame-des-Landes, c’est le placer au croisement de dynamiques qui constituent la plus importante zone de chalandise qu’il lui soit possible de capter.
Ce développement urbain ne se fait pas au détriment du reste de la Bretagne, contrairement à ce qu’affirment souvent les opposants à l’aéroport de NDDL. En réalité, les métropoles de Haute-Bretagne, qui n’ont été que des passoires durant plus d’un siècle d’émigration bretonne vers la région parisienne, accueillent aujourd’hui des habitants et des entrepreneurs venant essentiellement du reste de la France et qui choisissent d’abord une qualité de vie et un dynamisme économique qu’ils ne trouvent pas toujours ailleurs.
Les mêmes opposants s’inquiètent du devenir des petits aéroports locaux et prétendent qu’on pourrait réorganiser le site actuel de Nantes-Atlantique pour lui offrir un potentiel de développement comparable à NDDL. Or, ignorer le frein considérable au développement que constitue sa localisation actuelle, avec l’obligation pour ses usagers provenant du nord de la Loire de passer par une rocade souvent congestionnée, ne ferait que maintenir une forte dépendance aux hubs parisiens. C’est ce qui explique la présence remarquée de pilotes d’Air France et d’ingénieurs d’Aéroports de Paris, aux côtés de citoyens engagés dans cette opposition très localiste. Et puis, conséquences aggravantes, cela provoquerait des risques et des nuisances encore accrus pour l’agglomération nantaise et ses habitants.
S’il est légitime de s'inquiéter pour l’avenir de quelques emplois directement liés aux activités aéroportuaires existantes qui, dans le cas Nantais, risquent simplement de déménager d’un site vers l’autre, voire pour l’avenir de quelques activités agricoles encore présentes sur le site de NDDL, il faut mettre dans la balance, au nom de l’intérêt général, le potentiel de développement économique considérable qu’apportera ce nouvel aéroport.
Il faut dépasser les localismes qui s’opposent à l’intérêt général et font système avec le centralisme parisien pour que la Bretagne dispose de deux aéroports majeurs : celui de NDDL pour des connections directes à l’international (principalement les aires dynamiques de l'Est breton) et l’aéroport de Brest, qui restera sans doute fortement connecté aux hubs parisiens, mais qui pourra aussi développer une offre avantageuse de correspondances via NDDL pour les habitants de l’Ouest breton. L'aéroport de Rennes ne peut avoir d'ambition internationale équivalente d'autant plus que le TGV direct vers Roissy offrira une option complémentaire à l'aéroport de NDDL.
Nous estimons enfin que la crise actuelle est le résultat de l’absence d’une vision stratégique territoriale partagée avec la population concernée.
Cela tient à un découpage des régions sans vision stratégique, que ce soit du point de vue géographique ou au regard du sentiment d’appartenance et de l’adhésion démocratique, sans vocation économique, sans identité de projets.
Ainsi la Région des Pays-de-la-Loire, faute de pouvoir défendre l’intérêt d’un tel projet à son échelle s’est mise à le promouvoir dans la perspective d’un espace Grand Ouest indéfini, sans perspective d’appropriation citoyenne et donc démocratique, et sans aucune identification à l’international.
Que la zone de chalandise de ce futur aéroport dépasse les limites de la Bretagne historique, cela ne fait aucun doute, et c’est même une excellente chose. Raison de plus pour ancrer un tel équipement, de portée intercontinentale, dans un territoire de forte attractivité, à l’image affirmée dans le monde entier, qu’est la Bretagne. Et puis, la Bretagne réunifiée offre les perspectives d’une grande cohésion civique et sociale, suscitant même des engagements citoyens bien au-delà de ses frontières, grâce à une diaspora très dynamique. Dotée d’une institution régionale aux pouvoirs élargis, elle aurait permis depuis longtemps l’appropriation citoyenne de ce projet, ainsi qu’une meilleure coordination des collectivités les plus directement concernées.
Le seul fait qu’on ait pu donner à cet aéroport le nom provisoire d’Aéroport du Grand Ouest illustre bien les difficultés de ses promoteurs actuels à donner du sens à sa réalisation. Il est temps de nous réapproprier ce projet et à ce titre d’engager le débat sur le nom qui pourrait lui être donné. Anne de Bretagne ou encore Jules Verne ou Nantes Armorique, les exemples ne manquent pas pour lui donner un nom qui permettra au monde entier de le localiser facilement, c’est à dire à Nantes, en Bretagne.
Groupe constitué pour construire et diffuser un argumentaire breton pour la défense du projet de NDDL avec en perspective la consultation du 26 juin en Loire-Atlantique.
Appel "Pour un Oui Breton à NDDL"
Pdf : (voir le site)
Groupe Facebook : (voir le site)
Cet appel « Pour un Oui Breton à NDDL » a été rédigé librement et collectivement par un groupe d’une quinzaine de personnes qui s’est constitué sur les réseaux sociaux à l’initiative de Ronan Kerléo et de Stéphane Péan.
Il comprend : Ronan Kerléo, Stéphane Péan, Alexis Guenego, Michel François, Marcel Marc, Alain Coraud, Jacques Lebreton, Gérard Olliéric, Hubert Chemereau, René Rousseau Joguet, Kevin Djez, Hervé Carro, Alain Poriel, Yann De Kerguelen, Philippe Romillat et Serek Gwen