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Une grave menace plane sur un des fleurons de notre patrimoine historique
La municipalité d'Ancenis qui est propriétaire du château d'Ancenis depuis 1985, – château édifié pour défendre la frontière bretonne sur la Loire et qui a été, de fait, maintes fois attaqué par nos voisins de l'est – envisagerait de faire construire un bâtiment moderne sur le site pour y installer divers services du Conseil général de Loire-Atlantique.
On vient de démolir la "verrue" que constituait le bâtiment construit au XIXe siècle et qui abritait jusqu'à ces derniers temps une école ménagère, mais on s'apprête à construire une verrue encore plus énorme, dont les murs seront à moins d'un mètre de la muraille médiévale. Les accès des personnels appelés à travailler dans ce futur ensemble de bureaux défigureraient encore plus le site. Pour faire passer la pilule, l'architecte chargé du projet a imaginé un sympathique aménagement paysager des abords du château, aménagement pour lequel aucun financement n'a du reste été prévu. Le beau logis Renaissance qui se trouve dans l'enceinte du château, lui n'a pas fait l'objet du moindre travail de restauration depuis plus de 30 ans et demeure dans un état inquiétant.
Le scandale des scandales, mais qui n'est pas un cas isolé, c'est que l'architecte des bâtiments de France chargé de donner son avis sur tout aménagement ou toute restauration envisagés au château, est le même qui a fait les plans de l'immeuble de bureaux. Il s'agit d'un cas de plus illustrant la contradiction absolue qu'il y a dans le statut même des architectes des bâtiments de France, lesquels exercent une fonction d'intérêt public et peuvent avoir en même temps une clientèle privées et faire des travaux comme n'importe quel architecte. Cette situation qui a souvent été dénoncée mais qui subsiste toujours, est source de nombreux dysfonctionnements un peu partout en France. Il devrait y avoir incompatibilité absolue entre la fonction d'expertise au nom de l'intérêt général et une activité professionnelle lucrative dans le secteur marchand. On est là dans une situation digne de l'Ancien Régime...
Pourquoi construire dans ce lieu ? Ce n'est pas la place qui manque pourtant à Ancenis, ville très étendue, qui compte 7.000 habitants et qui dispose, entre autres, de beaux bâtiments encore inutilisés en partie, à proximité de la Loire, dans l'ancienne caserne Rohan du XVIIIe siècle, qui a longtemps été occupée par la Gendarmerie nationale et qu'une précédente municipalité avait voulu détruire, après le départ des gendarmes et de leurs familles. Ces bâtiments furent sauvés grâce à la mobilisation d'une partie des habitants et, depuis leur réhabilitation, on ne peut aujourd'hui que s'extasier devant la sauvegarde de ce patrimoine architectural de qualité.
Le Conseil général est bien embarrassé par cette affaire, il ne veut pas contrarier la municipalité, mais il ne résistera à ce projet que si un puissant mouvement d'opinion s'y oppose.
Plus de 3.000 habitants d'Ancenis ont signé déjà depuis quelques jours une pétition contre ce projet, qui avait été préparé jusqu'ici en catamini, mais, sans une mobilisation beaucoup plus large et beaucoup plus forte, l'irréparable risque de se produire dans les prochains mois.
L'ensemble des habitants des cinq départements bretons doit pouvoir exprimer sa solidarité avec la population d'Ancenis face à la détermination de quelques vandales bien décidés à ne tenir aucun compte de l'avis des défenseurs de l'histoire et du patrimoine.
Ce projet est d'autant plus absurde et imbécile qu'une action a été engagée récemment en vue du classement des châteaux des Marches de Bretagne, ensemble exceptionnel d'architecture militaire médiévale, au patrimoine de l'humanité. On voudrait saboter cette démarche que l'on ne s'y prendrait pas autrement.
Il y a 25 ans, en 1984, Ancenis a fêté de manière magnifique son millénaire et ses habitants ont alors redécouvert la riche histoire de leur cité. Manifestement, certains sont restés sourds et aveugles à cette prise de conscience...
Les promoteurs du projet ont osé parler d'un "heureux mariage" entre une construction ancienne et une construction moderne, ce qui est une sinistre plaisanterie. On peut se livrer à de tels "mariages" avec d'anciens entrepôts ou avec des manufactures du XIXe ou du XXe siècle, mais pas avec un château des XVe et XVIe siècles. Une telle construction, si, par malheur, elle venait à être réalisée, serait montrée du doigt dans toute la presse et couvrirait de honte ses auteurs. Il est encore temps d'écarter ce danger.
Que faire ? Chacun peut écrire (courtoisement) au maire d'Ancenis pour lui demander de renoncer à ce projet délirant :
Docteur Jean-Michel Tobie
Maire d'Ancenis
Place maréchal Foch, BP 30217
44156 Ancenis cedex
Courriel : mairie [at] ancenis.fr
Il conviendrait au contraire, maintenant que la "verrue" qui enlaidissait le site a disparu, de restaurer le logis médiéval et de réaliser un aménagement paysager discret, mettant en valeur cette superbe place-forte qui a joué un grand rôle dans l'histoire de Bretagne. En retrouvant toute sa beauté, ce château devrait devenir un atout touristique important pour la ville et le pays d'Ancenis, à l'entrée de la Bretagne.
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